Etre un petit investisseur en France en 2012 est un exercice des plus délicats : avec la fiscalité qui évolue continuellement, il devient difficile de savoir où investir son argent. C’est un peu comme jouer à un jeu dont les règles évoluent en cours de partie.
Rassurez-vous ce n’est que le début ! En effet, le projet de loi de finances (PLF 2013) se prépare pour 2013 et il aura un impact sur la fiscalité des revenus financiers. Ce projet a été proposé au conseil des ministres mais il sera sans doute amené à évoluer.
Même si rien n’est fait, je vais analyser ces propositions afin d’évaluer les impacts probables de ces mesures sur les petits investisseurs.
- C’est quoi le projet de loi de finances 2013 ?
- Les plus values mobilières
- Les dividendes et les intérêts
- Rions un peu
- La fiscalité du compte titre allourdie
C’est quoi le projet de loi de finances 2013 ?
Depuis de nombreuses années, les budgets de l’Etat français sont déficitaires : les dépenses sont supérieures aux revenus et l’Etat est obligé de s’endetter pour assurer son fonctionnement. En 2012, la dette publique s’élève à environ 90% du produit intérieur brut (PIB).
Pour briser ce cercle sans fin, l’Etat s’est engagé à réduire progressivement son déficit budgétaire afin d’atteindre l’équilibre en 2017.
Pour atteindre ses objectifs en 2013, le projet de loi de finances a été mis en place afin de limiter le déficit budgétaire à 3% du PIB. Ce projet contient de nombreuses mesures afin de limiter les dépenses publiques tout en augmentant les revenus perçus.
Vous pouvez trouver toutes les mesures du PLF 2013 ici.
Les plus values mobilières
Commençons par le plus simple : la fiscalité des plus values, page 8 du projet de loi :
Aujourd’hui, les gains de cession de valeurs mobilières et de droits sociaux des particuliers sont imposés à l’impôt sur le revenu au taux proportionnel de 19 %. L’ensemble de ces gains seront dorénavant imposés au barème progressif de l’IR et pourront à ce titre bénéficier de la déductibilité d’une fraction de la CSG.
Clair, net et précis : les plus values réalisées avec les valeurs mobilières (actions, obligations, etc…) seront intégrées à l’impôt sur le revenu. Le prélèvement forfaitaire libératoire est supprimé. Cette mesure touche principalement les foyers ayant un taux marginal d’imposition supérieur ou égale à 30%.
Les dividendes et les intérêts
Passons maintenant aux changements fiscaux concernant les dividendes et les intérêts, à la page 6 du projet de loi :
Actuellement, les dividendes et les produits de placement à revenu fixe peuvent être imposés, sur option, au prélèvement forfaitaire libératoire de l’impôt. Son taux est de 21 % pour les dividendes et de 24 % pour les produits de placement à revenu fixe. Ces revenus seront désormais imposés au barème progressif à compter de l’imposition des revenus 2012.
Les revenus issus des dividendes (actions) et des intérêts des placements à revenus fixes (obligations, livrets fiscalisés, comptes à terme…) seront également intégrés à l’impôt sur le revenu. Le choix du prélèvement forfait libératoire à 21 ou 24% n’existe plus.
Parallèlement, il est proposé d’instaurer, à compter de 2013, un acompte, prélevé à la source, au taux de 21 % sur les dividendes et 24 % sur les intérêts. Cet acompte sera imputable sur l’impôt sur le revenu liquidé dû au titre de l’année de perception des revenus. Le prélèvement forfaitaire versé en 2012 tiendra lieu d’acompte pour les revenus perçus au cours de cette année. Les ménages dont le revenu fiscal de référence est inférieur à 50 000 € pourront sur demande être dispensés du versement de l’acompte.
En résumé, l’imposition des dividendes et des intérêts se fera en 2 étapes (sauf si votre revenu fiscal est inférieur à 50k€) :
- à la source, un acompte sera prélevé de 21% pour les dividendes et de 24% pour les intérêts
- puis on intégrera ces revenus à l’impôt sur le revenu en tenant compte de l’acompte déjà payé
Quelle simplicité !
Toutefois, par mesure de simplification, les contribuables ayant perçu moins de 2 000 € d’intérêts dans l’année pourront demander que ces revenus soient imposés au taux forfaitaire de 24%, maintenant ainsi un caractère libératoire à l’acompte versé.
Finalement, le prélèvement forfaitaire libératoire à 24% existe toujours si vous touchez moins de 2000€ d’intérêts par an. Il faudra juste penser à le demander.
L’abattement fixe de 1 525 € ou 3 050 € applicable sur les dividendes, selon la situation familiale du contribuable, sera supprimé à compter du 1er janvier 2012.
C’est la mesure la plus pénalisante. Auparavant, les petits investisseurs qui touchaient moins de 1525€ de dividendes par an ne payaient pas d’impôts grâce à l’abattement fixe. Le PLF 2013 prévoit de supprimer l’abattement fixe. Quant à l’abattement proportionnel de 40%, il est maintenu.
Enfin, le taux de la déductibilité partielle de la contribution sociale généralisée (CSG) sur les revenus du capital imposés au barème, sera diminué de 5,8 % à 5,1 %, taux qui est
applicable aux revenus d’activité.
Tant qu’on y est : la déductibilité partielle de la CSG sera diminuée. Ce changement est mineur.
Rions un peu
Pour faire passer la pilule, une simulation est proposée (page 7) :
Un couple de salariés avec 2 enfants dont le revenu est de 72 000 euros, actuellement imposé au taux marginal de 14 % et percevant 1 500 euros d’intérêts, qui opte aujourd’hui à tort pour le PFL, est redevable, au titre de ces intérêts, d’une omposition de 360 euros. A l’issue de la réforme, son imposition au titre de ces intérêts sera réduite de 161 euros. Son gain au titre de l’impôt sur le revenu sera de 1500 x (24%-14%) = 150 euros, et son gain au titre de la CSG déductible (l’année suivante) de 1500 x 5,1% x 14% = 11 euros.
Si auparavant on optait pour la pire imposition possible, et bien maintenant on peut gagner de l’argent puisqu’il n’y aura plus de mauvais choix à faire.
Dans la finance, on a le sens de l’humour…
La fiscalité du compte titre allourdie
L’objectif annoncé est clair : taxer les revenus financiers comme ceux du travail.
Ces différentes mesures impactent fortement les revenus issus des comptes titres, des livrets fiscalisés et des comptes à terme.
Voici l’impact de ces mesures sur la fiscalité du compte titre :
Compte titre | Imposition aujourd’hui | Imposition avec le PLF 2013 | CSG |
---|---|---|---|
Plus value | 19% | IR | 15,5% |
Coupons | PFL (24%) ou IR | IR (avec acompte* de 24%) ou PFL (24%) si vous touchez moins de 2k€ d’intérêts | 15,5% |
Dividendes | PFL (21%) ou IR avec abattement de 40% et de 1525 € par personne | IR (avec acompte* de 21%) avec abattement de 40% | 15,5% |
Et sur les placements à revenus fixes (livrets fiscalisés, comptes à terme, …) :
Placements à revenus fixes | Imposition aujourd’hui | Imposition avec le PLF 2013 | CSG |
---|---|---|---|
Intérêts | PFL (24%) ou IR | IR (avec acompte* de 24%) ou PFL (24%) si vous touchez moins de 2k€ d’intérêts | 15,5% |
* L’acompte n’est dû que si le revenu fiscal de référence du foyer dépasse les 50k €.
Les investisseurs ayant un taux marginal d’imposition élevé (30% et +) seront pénalisés par la disparition du prélèvement forfaitaire libératoire.
Les petits investisseurs seront également touchés par la suppression de l’abattement fixe sur les dividendes.
Les revenus provenant des plans épargne action (PEA) et de l’assurance vie demeurent inchangés.
Avec le durcissement de la fiscalité du compte-titre, ces deux enveloppes fiscales deviennent encore plus intéressantes.
Bonjour,
Les français épargnent beaucoup trop et surtout en ce moment avec la peur de l’avenir, donc pour relancer la conso et donc la croissance, j’ai entendu dire que l’Etat allait s’occuper d’un plus près de l’assurance-vie. Ils vont finir par taxer un peu plus ce produit financier, tu verras….
Pour rappel, sur un compte titres la taxation sur les plus-values est de 34,50%, pas mal non ?
et les dividendes le sont également plus que dans un PEA.
Alexandre
Bonjour Alexandre,
Le PEA est une belle enveloppe fiscale oui mais si on veut constituer un portefeuille diversifié, il faut également investir à l’aide d’un CTO afin d’avoir des actions hors europe, des obligations…
Même si le CTO est pas mal taxé, il est difficile de s’en passer…
Bonne soirée
SAlut Phil,
heureusement, ton article sur la loi de finance se limite à la taxation des revenus mobiliers.
SI tu avais fait une extension à toute la loi, j’aurais plongé tête la première par la fenêtre.
J’ai calculé que mon imposition totale sur les revenus de mes garages était de 42 %.
Quasiment un euro sur deux gagnés est reversé…
Dur d’être investisseur
Bonjour Julien,
Effectivement, j’ai limité l’article aux revenus financiers, ça demandait déjà une bonne dose de travail 🙂
Il faut clairement prendre en compte la fiscalité dans les calculs de rentabilité mais je ne pense pas qu’il faille se laisser guider uniquement par cette dernière.
Bonne soirée
C’est clair que ton article reflète assez bien voir trop la réalité.
Je me posais la question récemment des différents tournants qui allait nous attendre il y a quelques semaines.
Ce qui m’impacte aujourd’hui ce sera les dividendes, une double taxe de 21% + impot sur le revenu qui risque fort de faire grincer des dents les investisseurs comme moi.
J’ai misé sur un e-commerce il y a quelques temps qui me proposait des beaux chiffres dans les années qui allaient venir et j’ai bien peur de voir diminuer ces chiffres, attendons de voir…
ps : question bête mais un compte assurance vie ouvert tôt (vingtaine d’age) est avantagé qu’une personne de trente ans? (par rapport à la durée du blocage?)
Bonjour Phillipe,
1) Le versement de l’acompte est prise en compte dans votre impôt sur le revenu : si vous versez 21% en acompte, et que votre TMI de l’impôt sur le revenu est de 30%, alors vous ne paierez que la différence, soit les 9%. Il n’est pas question de payer 2x 🙂
2) Concernant l’assurance vie, ce qui importe c’est l’âge du contrat. Au bout de 8 ans la fiscalité est optimale. Cherchez sur mon site, vous trouverez des articles dédiées. J’en parle également dans mon guide.
Bonne soirée
Bonsoir,
Pour ma part, faisant parti de la tranche des 30 %, mes dividendes seront taxés à 45.5 %. Bref, je suis sidéré car ce n’est pas avec des hausses d’impôts qu’on redressera l’économie française et le pouvoir d’achat des ménages. Malheureusement, nos hommes et femmes politiques n’ont pas le courage de faire des réformes structurelles à tous les niveaux car elles sont difficilement acceptables par l’opinion publique. En effet, nous français aiment le confort avec nos acquis.
Désolé pour cette petite parenthèse économique et politique.
Bonsoir Sovanna,
Ces mesures ne favorisent pas l’investissement, c’est à dire la prise de risque. Car oui, investir c’est prendre des risques. Si ça se passe mal, on perd une partie du capital investi, et si ça se passe bien on a une bonne partie des gains qui part en taxes.
C’est valable pour tous les investissements : entrepreneuriat, bourse, immobilier…
Enfin bon, faisons le dos rond et attendons. Après la pluie, le beau temps 🙂
Bonne journée
Bonsoir Phil,
Je rejoins tout ce qui a été dis précédemment. Dur dur d’entreprendre et d’être taxé à hauteur de 50% ou plus… De plus en plus de monde va s’exiler en Suisse, Belgique, Angleterre…
La croissance va être tué dans l’oeuf avec tant de prélèvement sur le dos des Français…
Si encore cela allait améliorer la situation ^^ C’est juste comme dis Sovanna un problème de réformes bien plus importantes qu’il faudrait mettre en place.
Bonne soirée,
Pierre-Antoine
Bonsoir Pierre-Antoine,
On va simplement espérer que cette taxation à tout va sera passagère 🙂
Oui je suis optimiste, il le faut bien !
Bonne journée